Faut-il abandonner le numérique responsable ?
Parce que bon, ce n’est plus vraiment la tendance.
Vous vous rappelez ce passage dans Independence Day ? Celui où le personnage de Jeff Goldblum, complètement ivre, reverse les poubelles de la Zone 51 en arguant que, perdus pour perdus, autant flinguer complètement la planète ?
Depuis l’élection de Trump et son Drill, Baby, Drill, les géants de l’énergie renforcent leurs investissements sur le fossile et ralentissent leur transition vers les énergies renouvelables. Ils ne sont pas les seuls à prendre ce genre de virage, la nouvelle investiture américaine provoque des changements de cap sur les sujets D&I et environnementaux, même au niveau international.
Après tout, nous sommes en économie de guerre, et le ESG de Environmental, Social, and Governance est devenu Énergie, Sécurité, Guerre, ce n'est pas moi qui le dit.
Tout le monde n’a pas la force de frappe d’Harvard pour lutter contre le président, alors forcément, quand on bosse dans le digital qu’on a un peu de conscience écologique et/ou sociale (coucou), on regarde tout ça en se demandant parfois si on ne devrait pas faire comme Jeff et envoyer valser notre stratégie de numérique responsable (E que s'apelerio la fatigue militante).
Mauvaise idée
Spoiler : non, on n’abandonne pas.
Parce que bon… même si on décide de s’asseoir sur ses valeurs éthiques et morales au prétexte (facile) de la crise, suivre les principes de numérique responsable, c’est comme une bonne hygiène, ça te permet certes de sentir bon en société, mais c’est aussi une bonne base pour rester en bonne santé.
Quand on applique (correctement) une stratégie de numérique responsable, on met en œuvre des actions pragmatiques qui permettent d’améliorer la qualité, la résilience et la performance des services numériques. Autrement dit, ça permet d’optimiser l’expérience utilisateur, de gagner en visibilité, en sécurité, d’absorber plus facilement les imprévus…
Ah oui, ça vous fera aussi gagner plus d’argent ! (comme ça vous pourrez convaincre votre boss sans passer pour un·e mangeur·se de graines aux pieds nus)
Du concret stp
C’est bien gentil de promettre air pur, argent qui coule à flot et retour de l’être aimé, mais en vrai, ça se traduit comment ?
Le premier chapitre du RGESN nous invite à réfléchir à la stratégie derrière nos outils numériques : est-ce qu’on en a besoin aujourd’hui ? est-ce qu’on prévoit de vérifier demain si on en a toujours besoin ? Avec des outils numériques simples, sobres et pour lesquels on a une stratégie de décommissionnement, on limite les couches technologiques et donc les points de défaillance. Ça nous garantit des services plus faciles à monitorer et qui subissent moins l’obsolescence.
Pour utiliser un buzzword qui fait bien en ce moment, les outils numériques éco-conçus sont plus résilients. Une résilience technique, mais également humaine, car les pratiques responsables s’appuient sur l’utilisation de standards (cf. toujours le RGESN), ce qui permet de mieux gérer les pénuries d’experts.
Et pour finir sur le sujet de la résilience, travailler avec des standards fiables et éprouvés, sur des systèmes sobres et correctement identifiés, réduit mécaniquement la surface d’attaque. Ça tombe bien, car en temps de guerre, la cybersécurité, ça joue.
Et au risque de me répéter, le numérique responsable ce n’est pas que l’écoconception. C’est par exemple l’accessibilité des services web (sur ce sujet aussi, on a un référentiel). Et guess what ? La mise en œuvre de l’accessibilité est particulièrement appréciée des moteurs de recherche. Dans le milieu, on appelle ça du SEO (pour Search Engine Optimization) et dans les grandes lignes, les algorithmes mettront plus en avant votre contenu s’il est accessible au plus grand nombre (no shit ?).
Alors si vous ne le faites pas pour les 14,5 millions de Français en situation de handicap, faites le au moins pour Google.
Et le cash dans tout ça ?
Je vous ai dit que le numérique responsable vous ferait gagner plus d’argent, et je sais que vous n’avez pas oublié.
Déjà parce que l’éco-conception des outils numériques vise à les rendre plus légers, donc moins gourmands en ressource (jusque-là, c’est assez logique). Les ressources d’un outil digital, ce sont l’espace disque, la bande passante et le “computing time”, tout ce qui va faire monter la facture de votre fournisseur cloud. Donc en optimisant vos outils, vous économisez sur l’argent que vous donnez à Amazon (qui est dans le camp ennemi, ne l’oublions pas).
En parlant d’Amazon… dans les années 2000, la firme de Bezos avait sorti cette statistique intéressante : pour 100 millisecondes de chargement supplémentaire d’une page, on enregistrait une perte de chiffre d’affaires de 1%. La raison : le taux de rebond (rien à voir avec Wilt Chamberlain). Si votre site est trop lourd, trop long à charger, les visiteur·ses iront voir ailleurs (ailleurs = la concurrence, obviously). A contrario, un site plus frugal résistera mieux au rebond, protégeant ainsi le CA.
Je parlais tout à l’heure de l’utilisation de systèmes sobres et standardisés. Là encore, on est sur des pratiques qui permettent de réduire ce qu’on appelle la dette technique. Le terme est assez parlant, une dette technique, ça se rembourse. Et généralement, on la paye en coût d’évolution.
Bref, une réduction des charges pour une augmentation du chiffre, tout est là pour transformer votre DAF en miltant·e pour le climat.
Regulation ready
Un dernier point qui n’est pas neutre : en bons européens que nous sommes, nous aimons aiguiller les transformations vertueuses par la réglementation. CSRD, RGPD, DMA, AIAct … tous ces acronymes qui deviennent de plus en plus familiers nous montre que le cadre légal dans lequel évolue les entreprises tend à être toujours plus contraignant.
Que l’on pense que ce soit une bonne ou une mauvaise chose, force est de constater que ce qui était hier des recommandations sont aujourd’hui des obligations. En suivant les recommandations actuelles, vous vous assurez de ne pas être au pied du mur le jour où elles feront loi (évitant par la même occasion d’être la proie d’experts plus ou moins scrupuleux profitant de la situation pour vous vendre des mises en conformité au prix fort).
Bref
Vous l’aurez compris, correctement implémentés, les principes de numérique responsable ne vont pas seulement rendre vos outils numériques plus vertueux sur les plans environnementaux et sociaux. Ce sont tout un ensemble de pratiques qui sont depuis longtemps identifiées comme des bonnes pratiques de développement, mais qu’on “oublie” parfois de mettre en œuvre parce qu’elles sont moins visibles, moins fun, voire méconnues.
Si de prime abord le sujet du numérique responsable peut vous sembler être un sujet chiant, qui vient juste mettre des bâtons dans les roues des entreprises, on se rend finalement compte, en creusant le sujet, que c’est un excellent levier de performance.
Et d’ailleurs, si vous voulez entamer ou accélérer votre démarche vers le numérique responsable, je me permets de vous rappeler que j’ai fait un (modeste) petit guide pour savoir par où commencer.
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À propos de moi
Je m’appelle Cédric Spalvieri. Blogueur et conférencier, j’ai accompagné ces 20 dernières années la transformation digitale d’entreprises de la PME au groupe international. Curieux des mutations que subit notre société, je m’intéresse à la manière dont les évolutions du numérique impactent le monde dans lequel nous vivons.
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