Ça se passe dans un petit village au bord de la mer, au Mexique… et puis tiens, vous n’avez qu’à regarder la vidéo, ça ira plus vite (1 min 30).
Si vous avez un minimum d’activité sociale, vous avez certainement déjà entendu quelqu’un clamer que l’IA allait supprimer des métiers, que vous seriez bientôt remplacé.e par une personne qui sait mieux l’utiliser que vous, et que demain, des tech-bros entrepreneurs changeront le monde avec une armée d’agents IA à la place d’employés.
Que demande le peuple ? Avec de telles promesses de gain en productivité, on devrait pouvoir faire grimper le PIB en prenant 15 semaines de congés, une retraite à 50 ans et des week-ends de 3 jours. Non ?
Spoiler : non
De mon point de vue, cette promesse repose sur un double mensonge.
D’une part, comme le montre par l’absurde notre histoire de Mexicain, la société est ainsi faite que l’on cherche à augmenter la quantité de travail plutôt que de profiter de ces gains pour glandouiller. On pourrait refaire l’histoire du capitalisme pour comprendre pourquoi, mais c’est long et j’ai la flemme. J’écris ces lignes pendant le pont du 8 mai, donc c’est socialement acceptable de glander. Je ne vais pas m’en priver.
Les progrès techniques ne font pas baisser la quantité de travail. Quand la productivité augmente, on en fait toujours plus.
Machine à vapeur, robotique… toutes les innovations créées pour améliorer la productivité nous ont, comme le dit Janco, transformés en Iron Men qui exploitent de plus en plus facilement les ressources pour obtenir toujours plus de puissance. Je vous laisse méditer sur le fait que c’est le même plan des méchants dans James Bond.
Un travail qui migre
Là où je parle de double mensonge, c’est sur la réalité même du gain en productivité. Tariq Krim, que je suis depuis des années pour son point de vue éclairé sur le numérique, le formule très bien : l’IA ne supprime pas le travail, elle le déplace.
On vous fait peur avec “des personnes qui savent mieux utiliser l’IA que vous” et qui vont vous remplacer. Si je vous disais que ces personnes … c’est vous.
Je vous sens dubitatif·ves… je m’explique. Pour bien maîtriser l’IA dans un domaine professionnel, il faut être expert – a minima, compétent – dans ce domaine.
Ça commence par le prompt engineering… vous pouvez lire des dizaines de guides récupérés en commentant “Prompt” sous le post LinkedIn du 24ᵉ expert de la journée, ça ne vous avancera pas à grand-chose. De toute façon, il a probablement généré son PDF en 20 minutes avec Gamma.
“Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement, et les mots pour le dire arrivent aisément” nous disait déjà Nicolas Boileau en 1674… Pour faire un bon prompt, il faut avant tout savoir de quoi l’on parle. C’est la base. Si vous savez vous exprimer clairement sur un sujet, vous savez prompter.

Une expertise résiliente
Développer une expertise en dehors des IA vous permet d’avoir une confiance en vous qui dépasse celle que vous accordez à l’IA. Une étude menée conjointement par Microsoft et la Carnegie Mellon University a révélé qu’une trop grande confiance dans les résultats de l’IA mène à une perte d’esprit critique et, à terme, à une diminution des compétences en résolution de problèmes.
Je me souviens d’un jour où l’outil de contrôle de gestion de la boite dans laquelle je bossais est tombé en panne à un moment critique. Le directeur du service a demandé aux équipes, paniquées, de simplement faire comme avant : crayon, feuille et calculette. Sans béquille.
L’IA est un outil puissant, mais n’est qu’un outil. Comme le résume parfaitement Nouveau Départ : Ceux qui excellent dans l'interaction avec l'IA sont ceux qui pourraient s'en passer. D’où l’importance de maîtriser les fondamentaux.
Les agents IA, des esclaves … à former
Peut-on faire tourner une boite 15 fois plus vite en remplaçant les salariés par des agents IA ?
Depuis quelques semaines, je suis une formation sur la création d’agents IA. C’est loin d’être magique et sans effort.
C’est puissant, peut-être révolutionnaire, mais en plongeant dans le sujet, on réalise rapidement que ça demande une grosse quantité de travail. Plus j’avance, plus je me rends compte qu’une bonne maitrise des design patterns1 de programmation est nécessaire pour créer des agents efficaces. On en revient aux fondamentaux.
Alors oui, on peut faire de l’automatisation “agentique” sans développer, en NoCode, mais ça reste de l’automatisation. Les derniers modèles comme GPT-4o, Claude-3.7 ou Qwen-2.5 ont des capacités de raisonnement incroyables, ultra-pertinentes pour exécuter des workflows. Mais un (bon) workflow d’automatisation, avant d’être exécuté, ça se réfléchit. Si vous ne savez pas en concevoir sans agent IA, je doute que vous y parveniez facilement avec.
Le cours normal des choses
Le grand remplacement par l’IA n’est rien d’autre que la suite logique du progrès technique (qui s’accélère depuis des siècles).
D’après une citation de Jeff Bezos, dont je doute de la véracité puisque je n’en trouve aucune trace, “il y a en ce moment dans son garage quelqu’un qui travaille sur la prochaine innovation qui tuera Amazon”.
L’arrivée de nouvelles technologies modifie constamment notre rapport au monde et au travail, pas toujours pour le meilleur, j’en conviens. S’adapter a toujours été une nécessité, et posséder une expertise, même historique, a toujours été un atout plus qu’un frein.
En bref
Non, l’IA ne vous fera pas gagner du temps. Ou plutôt, pas sans effort.
Elle ne supprime pas le travail. Elle le déplace. Elle le transforme.
Si elle exige de vous de nouvelles compétences, c’est surtout votre expertise réelle, dans votre domaine d’activité, qui a de la valeur pour rendre l’IA pertinente.
Maîtriser l’IA, ce n’est pas maîtriser une baguette magique. C’est savoir penser, structurer, questionner. Et ça, vous ne pouvez l’apprendre qu’en travaillant – avec ou sans IA.
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À propos de moi
Je m’appelle Cédric Spalvieri. Blogueur et conférencier, j’ai accompagné ces 20 dernières années la transformation digitale d’entreprises allant de la PME au groupe international. Curieux des mutations que subit notre société, je m’intéresse à la manière dont les évolutions du numérique impactent le monde dans lequel nous vivons.
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